« J’étais venu ici pour avoir une histoire à raconter, mais il se passa un certain temps avant que je ne trouve quelque chose à dire. » 1978. Pete Fromm entame sa troisième année de biologie à l’université de Missoula dans le Montana. De ses étés à camper en famille et après avoir boulotté les récits épiques de trappeurs chevronnés, l’étudiant de 20 ans se rêve aventurier. Homme des montagnes, le fusil à l’épaule, prêt à chasser l’élan, le dépecer, en faire son dîner et conserver la peau à tanner. Alors quand, suite à un désistement, un poste de saisonnier dans l’Idaho, consistant à surveiller des œufs de saumon avant qu’ils n’entament leur migration, se révèle vacant, Pete Fromm postule immédiatement. La tente où il logera pendant sept longs mois se situe à la jonction de la Selway et d’Indian Creek. Sa mission ne l’occupera qu’une poignée de minutes par jour, le temps de s’assurer que le lac où couvent les œufs n’a pas gelé. Avec pour seule compagnie sa chienne Boone, Pete Fromm expérimente l’extrême solitude au cœur des grands espaces américains. Le refuge isolé est niché dans un étroit canyon à des milliers de miles de la prochaine habitation. Les journées s’écoulent lentement, entrecoupées uniquement du passage des rangers, du garde forestier lui livrant le courrier ou des braconniers. Le temps comme en suspens lui permet d’apprivoiser le monde sauvage. Sous la forme d’un journal de bord savoureux, dans la veine des écrits de nature writing, l’apprenti homme des bois nous confie autant ses succès de chasse – la prise d’un élan, que ses revers de fortune – une intoxication alimentaire carabinée ou l’échec de l’expédition à Thanksgiving entreprise par son père et son frère restés bloqués par des congères. Le ton est à l’autodérision, le regard porté sur la nature sauvage doux et précautionneux. Le succès de ce récit autobiographique d’un hiver en solitaire dans les Rocheuses tient davantage à la tendresse de l’aventurier en herbe, à une certaine forme d’honnêteté et de candeur dans la manière de témoigner, qu’au style relativement plat qui ne m’a pas transportée. Reste que l’aventure mérite d’être racontée et pourquoi pas tentée.
Mon évaluation : 3,5/5
PRIX DES JEUNES LIBRAIRES 2020 / PRIX LITTÉRAIRE DE LA PACIFIC NORTHWEST BOOKSELLERS
Date de parution : 1993. Aux Éditions Gallmeister, traduit de l’anglais (États-Unis) par Denis Lagae-Devoldère, 256 pages.
Qu'en pensez-vous ?