« J’ai enfin trouvé un titre pour les versets de Semence de la Terre : Le Livres des vivants. […] J’essaie seulement d’écrire la vérité. Je ne tiens pas à être originale et créative. La clarté et la vérité me suffisent amplement, si toutefois je parviens à les exprimer. […] je me débrouillerai pour diffuser ma croyance auprès de ceux qui voudront m’écouter.
Je sèmerai. »
Dans un futur proche, une adolescente de 15 ans atteinte d’un syndrome d’hyperempathie – lié à la consommation par sa mère toxico de Paracetco, s’en va prêcher la bonne parole sur les routes de Californie ravagées par les incendies. Malgré le contexte d’insécurité permanent, qui aggrave sa porosité à la douleur d’autrui, l’hypersensibilité de Lauren Olamina se révèle un atout quand il s’agit d’absorber le monde dans lequel elle vit. De l’observer avec acuité, en vue d’établir une communauté selon les préceptes qu’elle a édictés. Ainsi, alors que les pénuries d’eau et d’énergie s’accentuent, que l’esclavage ressurgit, que la circulation d’armes à feu attisent les tensions, que se multiplient les privatisations, que les violences interraciales explosent, que les gens forment des milices armées et se barricadent dans des quartiers hautement sécurisés, Lauren pose sur le papier les préceptes d’une croyance pragmatique reposant sur la solidarité et la responsabilité de l’individu envers la collectivité. Une nouvelle religion ayant pour vocation d’éviter à l’humanité l’extinction. À la manière d’aphorismes, les versets de Semence de la Terre énoncent des vérités fondamentales : la réalité ; puisque Dieu est, tout simplement. Ni moralisateur, ni démiurge tout-puissant, le Dieu de Lauren est changement, le monde en mouvement. Visionnaire et anxiogène dans sa retranscription du déclin de notre civilisation, La Parabole du Semeur est une dystopie survivaliste magnifiquement portée par une jeune prédicatrice itinérante dispensant son enseignement. Grande dame de la science-fiction, Octavia E. Butler excelle dans cette littérature d’anticipation qui transcende les dérives de l’humanité grâce à la foi intacte qu’à l’autrice en sa capacité à se réinventer.
Mon appréciation : 4/5
Date de parution : 1993. Aux Éditions Au Diable Vauvert, traduit de l’anglais (États-Unis) par Philippe Rouard, 368 pages.
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