« Je confesse maintenant la vérité. Ce n’est pas la bombe atomique qui a tué mon père. C’est moi qui l’ai tué. C’est une coïncidence que la bombe atomique soit tombée le jour de sa mort. » Cette révélation, Namiko se la prend de plein fouet quelques jours après le décès de sa mère. Celle-ci ayant pris soin de laisser deux lettres à son notaire. L’une adressée à sa fille, l’autre à son frère. Deuxième choc pour Namiko qui n’avait pas connaissance de l’existence de ce dernier. Quels secrets sa mère lui a-t-elle cachés toutes ces années ? En plus de lui révéler abruptement, et sans possibilité d’éclaircissements, des pans entiers de son passé, sa mère la missionne de retrouver ce frère qu’elle n’a pas revu depuis la fin de la guerre. Ou plutôt depuis l’explosion de la bombe atomique sur Nagasaki, qui a permis par un hasard bienheureux de masquer le crime commis. De ce passé tout ce qu’elle sait, c’est ce que sa mère a accepté de lui confier, avant de se taire et de ne plus jamais évoquer le sujet : « Il y a des cruautés qu’on n’oublie jamais. Pour moi, ce n’est pas la guerre, ni la bombe atomique. » Des secrets de famille enfouis, un amour adultère, un autre interdit qui va à l’encontre de toutes les règles sociales établies…dans cette lettre testamentaire à valeur de confession, Namiko voit se dérouler sous ses yeux les destins croisés de deux familles, que les désirs pervers et narcissiques d’un homme ont fait plier jusqu’à les faire imploser. Si la littérature japonaise excelle dans l’art de mettre en scène des personnages ambivalents en proie à des tiraillements d’ordre esthétique, liés à des questions d’honneur ou encore le fruit de désirs refoulés, Aki Shimazaki est une perle de la culture nippone. L’autrice japonaise allie concision et précision et n’a pas son pareil pour dépeindre la noirceur de l’âme humaine, ainsi que la complexité des liens familiaux dans un style minimaliste, limpide et addictif. De sa plume cristalline, elle nous attrape, nous envoûte, nous fait pénétrer dans un univers cotonneux que l’on quitte à regret. Avec pour seul réconfort, l’assurance de trouver en librairie un autre volet de cette superbe pentalogie.
Mon évaluation : 4/5
Date de parution : 1999. Grand format aux Éditions Actes Sud, poche chez Babel, 120 pages.
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