Mishima, Zweig, Woolf, qu’ont ces auteurs en commun hormis le fait de m’avoir conquise dès les premières lignes de leurs écrits ? Deux choses intrinsèquement liées : une sensibilité aiguë au monde, une manière de le percevoir avec acuité, de capter derrière le masque des apparences l’âme des hommes et les passions qui les tiraillent. La deuxième similarité réside dans le choix délibéré de s’ôter la vie. Le suicide par seppuku pour Mishima, venant clore non sans cohérence, une vie entièrement tournée vers une quête absolue de la beauté. Le suicide par immersion pour Virginia Woolf, dont l’œuvre est traversée par son obsession pour l’eau, jusqu’à inoculer à son style des effets miroitants et ondoyants. Le suicide en exil au Brésil pour Stefan Zweig, qui après avoir achevé son testament littéraire Le monde d’hier, et nostalgique d’un monde révolu, préféra se retirer. Le dernier aspect éclairant certainement le premier et inversement. Puisque il est vraisemblable qu’être doté d’un tel supplément d’âme et d’une telle perméabilité au monde a dû contribuer à renforcer leur vulnérabilité. Nous offrant par ailleurs des textes de toute beauté. Alors, après avoir dévoré (presque tout) Zweig et lu Les Vagues de Woolf, je me lance avec un bonheur ineffable dans la lecture du cycle La mer de la fertilité écrit par le plus français des écrivains japonais. Ce cycle de quatre romans, Yukio Mishima l’a terminé le matin-même de sa mort. « Selon son auteur, cette tétralogie contient “tout ce qu’il savait de la vie ”. »
🇯🇵 Neige de printemps (La mer de la fertilité, Tome 1) de Yukio Mishima 🎏
Testament littéraire, le cycle de La mer de la fertilité concentre la quintessence de l’œuvre du romancier japonais torturé. La tétralogie clôt une vie tournée vers une quête esthétique et une recherche d’absolu, que le prestige déchu d’un empire en déclin aura conduit à abroger. Alors que chez Mishima, beauté et mort se confondent, son combat intime s’incarne dans un roman incandescent relatant l’histoire d’amour tragique d’un couple d’adolescents. (Lire la suite)
🏴 Les vagues de Virginia Woolf 🌊
Difficiles d’accès, hermétiques, les écrits de Virginia Woolf ont tendance à nous résister. Comme si la vie tragique de la romancière anglaise, qui se suicida par noyade, avait jeté un voile sur son œuvre et dressé une cloison entre elle et ses lecteurs. Et pourtant, la plume de Virginia Woolf dans Les vagues est d’une somptuosité rare. Lire Les vagues, c’est toucher du doigt une sensibilité à fleur de peau, effleurer l’esprit et l’âme d’un génie. Don’t be afraid of Virginia Woolf ! (Lire la suite)
🇦🇹 Le monde d’hier de Stefan Zweig 🖋
Le 21 février 1942, Stefan Zweig envoie le manuscrit du Monde d’hier à son éditeur. Le lendemain il se donne la mort. Ce document, qui fait figure de testament légué à la postérité, est le témoignage précieux d’un écrivain persécuté. Stefan Zweig y livre une lecture éclairée de l’Histoire. L’écrivain juif autrichien, contraint de vivre en exil au Brésil, rédige un ouvrage qui échappe à toute tentative de définition. À la fois document historique, récit autobiographique et analyse sociologique, l’œuvre est protéiforme. Stefan Zweig laisse librement s’exprimer cette nostalgie du temps passé, ainsi que ses doutes vis-à-vis de l’avenir. Cet esprit visionnaire sut mieux que ses contemporains décoder son époque. Le monde d’hier est le constat amer de cet échec à bâtir une identité européenne solide à même de résister aux assauts du totalitarisme et aux chants des sirènes du nationalisme. (Lire la suite)
À LIRE ABSOLUMENTCHEF-D'ŒUVRECLASSIQUE
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