« Plutôt que de chercher ce qu’on a perdu, mieux vaut prendre soin de ce qui nous reste. » Douceur, réconfort et éloge de la lenteur sont les ingrédients du succès de l’autrice nippone Ito Ogawa, qui nous enveloppe avec des romans pleins de bons sentiments. Le cœur lourd de la disparition de l’Aînée – sa grand-mère qui l’a élevée, Hatoko revient au pays où elle hérite de la papeterie Tsubaki ; refusant de sacrifier aux rites sacrés qu’elle entend perpétuer. En s’installant dans la maison traditionnelle en bois, la jeune femme de vingt-cinq ans s’inscrit dans la lignée des femmes de sa famille, écrivains calligraphes depuis l’époque d’Edo. Mais Hatoko n’arrive pas à faire le deuil de sa relation avec l’aînée, qui conserve un goût d’inachevé. Le conflit générationnel s’est cristallisé autour d’une enfance passée à se plier à des exercices de calligraphie sous la surveillance d’une grand-mère autoritaire à la discipline de fer. Non loin de Tokyo, c’est dans la petite ville côtière de Kamakura, riche de temples et sanctuaires shinto, que Hatoko fera la paix avec son passé. Le lieu invite à la réconciliation et à la contemplation. La vie y est douce. Les saisons marquent le passage du temps, qui s’y écoule lentement. Le bonheur s’éprouve dans l’instant présent. Dans les petits riens : le soin mis à trouver le bon papier, la plume, l’encre et la calligraphie pour refléter au plus près l’intention exprimée par la personne qui l’a missionnée. Au fil des missives rédigées, Hatoko se lie d’amitié avec ses voisins et trouve sa place. Son statut d’écrivain public lui offrant une fenêtre privilégiée sur l’intimité des habitants du quartier venus lui confier leurs secrets, en sirotant une tasse de thé. Hatoko transforme la papeterie en un lieu chaleureux. Au gré des floraisons des cerisiers et des plats savoureux d’anguille dégustés, une année passe, lissant les sentiments ambivalents qui la traversaient depuis des années. Atténuant aussi la culpabilité de n’avoir pas pu dire adieu à celle qui, malgré sa sévérité, lui a transmis la faculté d’entrer en empathie, de se glisser dans la peau d’autrui, soulageant les âmes en mettant les sentiments par écrit.
Mon évaluation : 4/5
Date de parution : 2018. Éditions Philippe Picquier traduit du japonais par Myriam Dartois-Ako, 384 pages.
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