Au cœur d’une vallée située en haute montagne, bordée par une nature luxuriante et quasi virginale, des ouvriers dressent leur campement. Parmi eux un homme, cherchant désespérément à fuir l’agitation de la ville, trouve dans cet isolement, ce lieu reculé à l’écart de la civilisation, l’endroit rêvé pour apaiser ses tourments. La peine qu’il a purgée n’a pas atténué le souvenir de sa femme le visage défiguré par les coups qu’il lui a asséné, ni celui de l’effroi lu dans les yeux de son amant. Mais c’est surtout cette haine, intacte après tant d’années et qui continue de l’irriguer, dont il aimerait se délester. Le chantier dans lequel il s’est engagé vise à édifier un barrage, condamnant ainsi le hameau situé en contrebas de la vallée. Les travaux se poursuivent, la dynamite vrille les tympans et ébranle les maisons des habitants. Et dans ce monde englouti par la brume, le destin de l’homme se lie étroitement à celui du village. L’homme est bouleversé par la faculté des habitants à faire preuve de résilience, de constance dans leurs actions, quitte à réparer vainement les toitures des maisons ébranlées par les détonations. Il retrouve dans leurs traditions des gestes qui font écho en lui, et que lui-même a par le passé effectués, sans en mesurer pleinement la portée. Quand ses gestes à lui étaient dictés par la colère, les leurs le sont par la déférence qu’ils témoignent à leurs morts. L’homme réalise qu’un même acte revêt un sens différent en fonction de la portée qui lui est assignée. Ce constat provoque un changement en lui. La paix qu’il a longtemps recherchée est désormais à sa portée. Akira Yoshimura tempère la violence des passions par une constance dans l’action. L’application d’une gestuelle intemporelle obéissant à des traditions ancrées depuis des générations. Cette opposition muette d’un peuple condamné à être délogé émeut. Malgré le déchirement du déracinement, rien ne vient entamer l’attitude inflexible et résignée avec laquelle ils acceptent les conditions de leur expropriation. Ce roman d’Akira Yoshimura est une fable sensible portée par une douce poésie, relatant la quête de rédemption d’un homme guidé par ses pulsions.
POÉSIEReading makes you happy !
Reading makes you happy !
Catégories
Archives
Rejoignez-moi sur Instagram
Articles récents
- Migraine, une histoire de culpabilité, Tamás Gyurkovics : héros ou collabo ? 14 janvier 2025
- À l’Ouest rien de nouveau, Erich Maria Remarque : un manifeste pacifiste dénonçant l’absurdité de l’idéologie guerrière, devenu un chef-d’œuvre intemporel 6 janvier 2025
- Le cœur est un chasseur solitaire, Carson McCullers : le Sud profond des États-Unis, décor d’un premier roman possédant la force évocatrice des films en noir et blanc 28 décembre 2024
- Pastorale américaine, Philip Roth : un drame familial met à nu la faillite morale de l’Amérique puritaine des années 60 19 décembre 2024
- Une femme fuyant l’annonce, David Grossman : les Milles et Une Nuits d’une mère qui tente de maintenir son fils en vie 12 décembre 2024
Qu'en pensez-vous ?