Sortez les mouchoirs, les vacances d’été touchent à leur fin ! Néanmoins, cette année la rentrée a un goût particulier et s’annonce riche en émotion. Qui dit rentrée, dit rentrée littéraire et sa flopée de nouveaux romans. Cette année ce sont 581 romans qui voient le jour et vont se disputer la vedette sur les étals des librairies. Les têtes d’affiche attendues avec impatience sont entre autre : Amélie Nothomb – sans qui la rentrée littéraire perdrait tout son sens puisqu’elle est l’occasion chaque année de la sortie d’un nouvel opus, Marie Darrieussecq – dont vous retrouverez la chronique de son nouveau roman en ligne sur mon blog, Éric Reinhardt, Chantal Thomas, Érik Orsenna, Lola Lafon, Sorj Chalandon, Kamel Daoud, Patrick Deville… Cette déferlante livresque a été l’occasion pour moi de découvrir le roman de Julie Wolkenstein intitulé Les Vacances – avec lequel j’ai décidé d’ouvrir le bal de la rentrée littéraire 2017. Titre oh combien évocateur en cette fin de période estivale. Je n’aurais pas pu entamer cette lecture à un moment plus propice. Ce flottement, entre le retour des vacances et le début d’une nouvelle année scolaire, a contribué à me plonger dans un état de douce nostalgie qui a trouvé un écho dans ce roman enveloppant. Julie Wolkenstein nous offre une escapade en terres normandes à la recherche des raisons pour lesquelles le premier long métrage d’Éric Rohmer Les Petites Filles modèles n’a jamais vu le jour. Film inspiré du roman éponyme de la comtesse de Ségur. Cette quête menée par un duo atypique, une enseignante aux portes de la retraite spécialiste des écrits de la comtesse de Ségur et un jeune thésard dont le sujet porte sur des films disparus, va se révéler plus personnelle qu’elle n’y paraît. Ce périple normand sera l’occasion d’une remise en question et de découvertes inattendues.
Résumé
Automne 1952 : dans un château délabré de l’Eure, Éric Rohmer tourne Les Petites Filles modèles. C’est son premier long métrage. Presque achevé, jamais sorti au cinéma, il a disparu. Printemps 2016 : Sophie, une prof d’université spécialiste de la comtesse de Ségur, et Paul, un jeune homme qui consacre sa thèse à des films introuvables, traversent ensemble la Normandie à la recherche de traces, de témoins, d’explications : Joseph Kéké, l’étudiant béninois qui a produit le film, a-t-il vraiment cassé une dent à une strip-teaseuse poétesse ? À quoi servent les châteaux en ruine ? Quel rapport entre la comtesse de Ségur, Éric Rohmer et le cinéma érotique des années 1970 ? Chemins faisant, c’est avant tout sur eux-mêmes que Paul et Sophie enquêtent.
Éditions P.O.L
Un duo dépareillé et attachant qui nous entraîne sur les routes normandes
Nos enquêteurs novices portent des prénoms de circonstance, tout droit sortis du roman de la comtesse de Ségur Les malheurs de Sophie. Sophie, ayant répondu positivement à une sollicitation professionnelle l’invitant à se rendre à Berkeley pour un colloque portant sur le cinéaste Rohmer et son rapport à la littérature, se voit dans l’obligation de se renseigner sur le dit Rohmer, dont l’oeuvre lui est pour le moins obscure. Pour cela, elle se rend en Normandie afin de prendre connaissance du dossier « RHM 79,5 ». Dossier comportant les éléments relatifs au scénario manuscrit des Petites Filles modèles. C’était sans compter sur Paul, qui s’est approprié le dossier pour les besoins de ses recherches. Une rencontre opportune a lieu entre les deux protagonistes. De fil en aiguille, conscients de leurs intérêts communs, ils décident de se lancer sur les traces du film presque achevé tourné à l’été 1952. Au gré des découvertes, la nébuleuse entourant le film s’éclaircit. Des secrets ressurgissent, le tournage des Petites Filles modèles semble avoir été marqué par une succession de drames. N’ayant pas d’affinités particulières avec le cinéma de Rohmer, je me suis pourtant laissée entraîner par le récit. Nul besoin de se passionner pour son oeuvre pour savourer cet ouvrage. C’est un roman emprunt d’humanité porté par un duo attachant. Une réelle complicité s’installe entre Paul et Sophie. Avec pudeur, les deux protagonistes se mettent à nu, confessent leurs doutes, réveillent les souvenirs, et donnent un nouveau virage à leur vie. C’est cette quête personnelle qui – sans se substituer à celle officielle, mais au contraire s’avère parfaitement complémentaire, donne une dimension plus dense au récit. Chacun se trouve à un tournant de son existence. Sophie voit sa carrière dans l’enseignement prendre fin, elle doit également décider quelle place elle doit donner à ceux qui l’entourent. On assiste à son éveil tardif, à un moment de sa vie où elle pensait que cette dernière n’avait plus rien à lui offrir. Paul est empêtré dans une situation amoureuse délicate. Ayant contracté un mariage blanc afin de fournir des papiers à une jeune femme rencontrée en Russie, la situation va un peu plus se détériorer lorsque les sentiments vont s’en mêler. Avec un naturel désarmant, Julie Wolkenstein aborde les relations humaines et l’intimité partagé entre Paul et Sophie.
Un sujet documenté, porté par une prose fluide
Julie Wolkenstein livre un roman délicat d’une érudition enveloppante, qui accompagne en douceur cette rentrée. L’écriture est directe, franche, bourrée d’humour. Seul bémol, la surabondance de parenthèses qui alourdit la prose de l’auteure. Ces apartés m’ont à plusieurs reprises fait perdre le fil du récit, et fait désagréable lorsqu’il se répète de trop nombreuses fois, il m’a fallu remonter en haut de la page pour me souvenir de quoi il en retournait. Les Vacances fourmille de détails concernant l’oeuvre de Rohmer. C’est le fruit d’un travail approfondi de documentation. C’est avec délectation qu’on assiste à la rencontre entre l’histoire cinématographique et personnelle d’un des personnages.
Conclusion
Les Vacances est un roman que je conseille si vous êtes à la recherche d’une lecture agréable, dépaysante. Il agit comme une douce invitation au voyage et se lit comme du petit lait. Je précise toutefois, que ce n’est pas un coup de coeur. Si vous cherchez un roman dérangeant, soulevant des interrogations, percutant…alors passez votre chemin, vous n’y trouverez pas votre compte 😉 Pléthore d’autres romans de cette rentrée littéraire vous permettront de trouver votre bonheur.
>>> RENTRÉE LITTÉRAIRE 2017 (#RL2017)