« Quand deux êtres faits l’un pour l’autre contrarient leur penchant, ils se vouent à une vie pleine d’amertume et de regrets. » Et entraînent dans leur sillage les êtres qu’ils côtoient. Des descendants qui, sitôt nés, se retrouvent frappés d’une malédiction contractée par leurs aînés. Vie amoureuse, c’est l’histoire d’une passion contrariée dont les répercussions affectent la génération d’après. Tout commence le jour où Ya’ara tombe sur Arieh, un ami de ses parents. L’attirance entre eux est instantanée et le jeu dangereux puisqu’ils sont tous les deux mariés. Obnubilée par Arieh, Ya’ara fuit son foyer. Telle une enfant gâtée étrillée par une passion qu’elle peine à étouffer, la jeune femme réorganise son monde autour de son amant négligeant les signaux lui indiquant qu’elle met les pieds dans une situation qui lui échappera inexorablement. L’attraction vire à l’obsession, mâtinée par un sentiment de répulsion que lui inspirent les secrets qu’elle déterre au fil de ses investigations. Cet homme pervers et mystérieux, pour qui elle brûle intérieurement, semble détenir les clés de son histoire familiale et donc de sa personnalité. Le fréquenter lui permet d’effleurer la vérité, de comprendre les fondations sur lesquelles s’est structurée son identité. Dans ce texte intimiste, construit comme un huis clos domestique extrêmement resserré, Zeruya Shalev nous offre une radioscopie du couple préfigurant une déliquescence programmée. Elle embrasse avec virtuosité ses thèmes de prédilection : l’adultère, les vertiges de la passion, le poids des secrets et la projection des désirs et frustrations sur l’être aimé. À l’instar de Douleur, ce sont les non-dits qui initient une « chaîne de culpabilité », une sorte d’effet papillon à retardement. Chez Shalev, la vie apparaît comme une immense toile d’araignée, dont les ramifications s’entrecroisent avec subtilité. Seule une enquête poussée permet d’en saisir toute la complexité. Ce que l’auteure israélienne réalise de sa plume acérée, aussi tranchante qu’un scalpel et d’une précision cruelle. Un thriller psychologique décapant.
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Date de parution : 2000. Grand format aux Éditions Gallimard, poche chez Folio, traduit de l’hébreu par Sylvie Cohen, 368 pages.
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