« Chacun s’attend à assister à la fin de quelque chose. Ce à quoi nul ne s’attend, c’est à assister à la fin de toute chose. » Dernière survivante d’une famille de colons décimée, Makepeace incarne les vestiges d’une utopie avortée. Une société survivaliste pensée comme une alternative au système capitaliste, mais que les dérives de ce dernier ont rattrapée. Revolver à la ceinture, Makepeace arpente à cheval les rues désertes d’une ville fantôme du Grand Nord, hantée par les souvenirs du pensée qu’elle peine à ravaler et dont les contours ont commencé à s’estomper. De cette terre de Sibérie, que la Russie a loué à des familles de pionniers pour la repeupler, il ne reste que des maisons délabrées et des carcasses d’animaux éventrés. Quelles est l’origine du cataclysme qui a tout dévasté ? Que sait-on de ce qu’il s’est passé ? Peu de choses. Hormis que des vagues de gens affamés sont venues s’échouer dans cette parcelle du bout du monde, fuyant désespérément la civilisation et la surpopulation. Les pénuries se sont succédées aiguisant la colère des pionniers et déclenchant des rixes avec les nouveaux arrivés, puis les épidémies ont parachevé l’œuvre d’autodestruction déjà entamée. Du monde d’avant, Makepeace conserve un pan de visage brulé et la volonté farouche de continuer à avancer. Coûte que coûte. D’autant que son quotidien monochrome est épisodiquement troublé par le passage au loin d’une colonne d’esclaves ou d’un avion, ultimes marqueurs d’une forme de civilisation. Makepeace est une guerrière, incapable de poser les armes tant que l’espoir de rejoindre une communauté de survivants ne l’a pas quittée. Alors, le courage en bandoulière, travestie en garçon pour ne pas éveiller les soupçons, elle prend la route. À mille lieux du western traditionnel, Marcel Theroux signe une fable post-apocalyptique d’inspiration biblique dont le charme repose principalement sur la personnalité d’une héroïne féminine au caractère bien trempé. Cette dystopie, à mi-chemin entre La route de Cormac McCarthy et l’épisode du Déluge, relève davantage du roman d’atmosphère que d’aventure et résonne étrangement avec notre présent.
Mon évaluation : 3/5
Date de parution : 2010. Grand format (réédition) aux Éditions Zulma, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Stéphane Roques, 400 pages.
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